La semaine (en mer) de Franck

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Du dimanche 20 avril au dimanche 27 : Civitavecchia, Messine, Athènes, Izmir, Héraklion, La Valette… Il y a une magie de la croisière. Ce n’est pas vous qui allez vers le monde, c’est le monde qui paraît venir à vous. Vous vous endormezbien tranquillementen mer Tyrrhénienne, et vousréveillez au-delà du Détroit ; laissez l’Acropole après déjeuner, vous retrouvez, pour dîner, en vue de Smyrne… Vous emmenez avec vous votre petit monde, et, doucement bercé, sans effort, abolissez les distances. Franchissez les siècles.

Lundi 21 avril. Taormina. Je comprends – que dis-je ? en vérité,je partage – le goût des Britanniques pour les vues, les trouées, les perspectives, les panoramas.Or, ce coin de Sicile, en surplomb de la mer, au pied de l’Etna blanchi de neige, en offre à revendre : cascade de points de vue genre « théâtre en ruines à la Piranèse », « ruelle sombre aux bougainvillées », « terrasse avec vue sur la baie bleue ridée »… L’œil est sans cesse appelé, retenu, caressé – comment font les gens du cru pour supporter tant de beauté ?

Jeudi 24 avril. Ephèse. Désordre et foule. Soulèvement de poussière. Agglutinement d’essaims, de groupes, de hordes touristiques… Je veux bien jouer les démagogues et feindre de passer outre, vient tout de même un moment où l’amoncellement des cars, des guides, des farandoles et des boutiques de souvenirs me paraît venir à bout des sites les plus merveilleux. Et que penser des dommages que ce piétinement quotidien doit faire courir aux vestiges de l’antique et superbe cité ? Mon navire pour un coin tranquille !

Vendredi 25 avril. Cnossos. Cela devait faire un bon quart de siècle que je rêvais des vestiges riants et colorés de la civilisation crétoise antique – minoenne, pour employer le terme consacré. Et cela faisait presque aussi longtemps que je repoussais l’échéance, craignant d’être déçu. L’archéologue Arthur Evans n’a-t-il pas été accusé, depuis un siècle, d’avoir réinventé le passé à grand renfort de béton armé, et rebâti un palais de Cnossos à sa fantaisie ? Eh bien, pour reprendre – de mémoire – Google est ici capricieux – la formule de Jean-Jacques à propos des arènes de Nîmes : « Le contentement passa l’attente ». Tout me plaît, ici ; j’ai l’impression forte et troublante d’être chez moi, de me sentir en harmonie profonde avec cette curieuse civilisation, vieille de vingt-cinq siècles. C’est décidé : sitôt de retour à Paris, je me penche enfin, sérieusement, sur ces danseuses bouclées et ces sauteurs de taureaux, et sur leur monde idéal de vagues noires, de spirales rouges et de volutes turquoise…

Dimanche 27. La Valette. Messe dominicale en la cathédrale Saint-Jean, festonnée d’or, adornée de fresques. Imaginez, au milieu d’un très riche mobilier d’argent rutilant, une dizaine d’officiants précédés d’une cohorte d’enfants de chœur, une chorale superbe soutenue par les accents de deux buffets d’orgue, pas moins, et la foule des fidèles clamant les respons en latin… La superbe cérémonie clôt en apothéose une semaine intense et riche. Où l’homme de la Manche et de l’Atlantique ne doit pas rechigner à s’incliner devant les trésors méditerranéens.

2 Commmentaires

  1. Chantal Deléage dit :

    Merci de nous faire partager les moments forts de votre merveilleuse croisière. Sans doute auriez-vous aimé continuer vos pérégrinations en Méditerranée mais vos admirateurs, dont je fais partie, sont ravis de vous retrouver en direct sur Europe 1. Heureusement pendant vos absences, les rediffusions nous font patienter!

  2. Gino HOEL dit :

    On ne dit plus « enfants de chœur », cher Franck, mais servants d’autel !… Votre escapade me donne envie…

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